Le 30 mars 2020, j’entamais mon premier jour à la SNCF pour une mission de 6 mois en tant que Product Owner web. L’arrivée dans une entreprise pour une nouvelle mission est toujours un moment particulier car, contrairement à un CDI ou un CDD, les personnes que nous allons rencontrer sont contractuellement des clients et non des collègues. Dans les faits, je préfère considérer mes collaborateurs comme des collègues plutôt que des clients. Cependant, il faut garder à l’esprit que chaque jour passé dans l’entreprise est un jour facturé, cela peut avoir une influence sur le regard et la relation des collaborateurs envers nous, les prestataires. D’autant plus que les prestataires, comme moi, sont souvent sollicités pour répondre à un besoin précis qui demande une expertise pas entièrement maîtrisée par le client. Ils attendent donc d’avoir un consultant opérationnel pour couvrir ce besoin rapidement. Le premier jour est alors toujours un moment décisif qui permet de prendre la température et de découvrir l’environnement qui va émaner de la mission.

Un contexte inédit

C’est donc avec un sentiment étrange que je démarrais le 30 mars ma première journée à la SNCF en étant chez moi, en visioconférence sur Microsoft Teams. J’ai ainsi fait la rencontre de mes nouveaux collègues pour les 6 prochains mois. Travaillant déjà pour SNCF depuis de nombreuses années, c’est le manager de mon cabinet de conseil qui a identifié cette mission, ce qui a facilité mon introduction auprès de l’équipe. J’ai rapidement saisi que le contexte du projet pour lequel j’ai été missionné était particulier : un site web vieillissant, une équipe de nouveaux arrivants au sein de l’équipe SNCF et un prestataire mandaté pour la refonte du site. Rapidement, je constate que tout le monde se rencontrait pour la première fois et je n’ai jamais vraiment eu l’impression d’être le « nouveau » à qui on doit tout expliquer, comme cela peut souvent arriver. Au contraire, plusieurs personnes sont même arrivées quelques semaines après mon arrivée. Une partie de ma mission est donc de les accompagner sur leur prise de poste afin qu’ils puissent assurer le RUN de leur projet et s’approprier également le nouveau site en cours de construction.

Le télétravail, un gain de productivité ?

Dans mon cas, malgré ce contexte inédit, je n’ai pas ressenti de grosse gêne quant au fait de démarrer cette mission en télétravail. La mise en route et certains aspects techniques ont été compliqués à gérer (récupérer une adresse mail et un poste de travail, avoir accès aux différentes plateformes de l’entreprise…) mais d’un point de vue purement professionnel, je pense que le télétravail a, dans mon cas, été bénéfique sur de nombreux aspects. Avant d’énumérer les points positifs que j’accorde au télétravail, je pense qu’il est important de préciser que je suis moi-même dans une situation propice à une utilisation positive du travail à distance : je n’ai pas d’enfants, je vis dans un espace suffisamment espacé et lumineux, je suis bien équipé (ordinateur performant, casque audio confortable) et je travaille dans le web. Je pense que ces critères ont forcément influencé de manière positive ma vision du télétravail.

Je suis arrivé dans la phase de cadrage du projet : c’est une période où beaucoup de réunions sont nécessaires afin de définir les grandes lignes du projet : architecture technique, choix de fonctionnalités, stratégie de test… etc. Je trouve que sur cet aspect, pour enchaîner les réunions avec beaucoup d’intervenants différents, le télétravail est assez bénéfique. Je ne sais pas ce qu’il en est à la SNCF mais dans de nombreuses entreprises, la gestion des salles de réunion est un véritable casse-tête : disponibilité, équipement, taille, disposition, localisation… Autant d’éléments qui n’existent pas en visioconférence. Je crée un lien que je rajoute dans l’invitation et c’est terminé. Pour ce qui est des réunions en elles-mêmes, mon sentiment est que le temps de parole est mieux partagé et qu’il est plus facile de se faire bien comprendre et entendre lorsque l’on prend la parole. Il y a bien sûr beaucoup de facteurs qui entrent en jeu et dépendent des intervenants (la qualité de la connexion ou encore le fait de couper le micro quand on ne prend pas la parole), mais d’une manière générale je trouve que les réunions ont été efficaces. D’autre part, dans le cadre de cette mission, de nombreux intervenants sont localisés à différents endroits. Le confinement a donc obligé chaque collaborateur à faire le nécessaire pour assurer le bon fonctionnement des visioconférences qui auraient été inévitables au vu de la situation géographique de chacun. Enfin, je pense que pour certaines professions, notamment les développeurs web, le fait d’être isolé et de pouvoir se concentrer à 100% sur ses tâches sans interruption (collègues qui vont faire une pause, bruit dans l’open space…) est définitivement un élément qui favorise la productivité.

Carton plein pour la visio ?

Bien évidemment, ces gains de productivité ne peuvent pas remplacer les liens sociaux qui peuvent se former autour d’une table. Le cadre de travail dans lequel nous travaillons sur ce projet, SCRUM, s’appuie sur de nombreux principes du manifeste de l’agilité qui prône des valeurs d’interactions, de transparence et d’adaptation. La situation idéale pour appliquer ce framework est donc de travailler physiquement ensemble pour faciliter les échanges, chose impossible pendant le confinement. C’est donc avec des solutions de contournement que l’équipe cherche à rester au plus près de cette manière de travailler, mais la distanciation reste tout de même un frein. Malgré les nombreux outils numériques qui permettent de réduire la distance et de collaborer à distance, il est toujours plus agréable de pouvoir converser et travailler avec des personnes en physique. Ces relations que l’on ne peut développer à travers un écran permettent d’impliquer chaque acteur dans le projet pour lequel il travaille. Alors oui, une visioconférence peut très bien faire l’affaire pour organiser une réunion, présenter un document ou encore animer un atelier, mais à mon sens ce n’est pas optimal pour un projet et une collaboration au long terme. Les conversations autour d’un café, en apprendre plus sur ses collègues, rencontrer de nouveaux collaborateurs au sein de l’entreprise sont à mon sens des moments essentiels au bien-être de chaque individu et renforcent le sentiment d’appartenance à un groupe, à un projet et à un objectif commun. Même si ces moments peuvent paraître anodins, je suis convaincu qu’ils participent à la motivation et à l’implication de chacun dans un projet et par conséquent augmentent la productivité de tous.

Une conclusion qui reste à déterminer…

Est-ce qu’il y aura un après-coronavirus pour le monde du travail ? Est-on déjà dans l’après ? Peut-on imaginer retrouver une situation similaire à ce que l’on connaissait ? Beaucoup de questions et d’incertitudes nous traversent l’esprit et c’est une bonne occasion de se remettre en question en tant que société mais également en tant qu’individu. Cette pandémie aura véritablement marqué les entreprises et leur mode de fonctionnement et l’on peut s’attendre à de nombreuses conséquences pour les années à venir. Certains y voient une menace avec désormais une ouverture à la concurrence étrangère, d’autres y voient une opportunité avec plus de flexibilité et de liberté sur notre façon de travailler. Une chose est sûre : l’année 2020 n’aura laissé personne indifférent.